L’esprit d’équipe est célébré dans toutes nos entreprises. En 40 ans de conseil, je n’ai jamais rencontré une organisation qui ne l’affiche pas au frontispice de ses valeurs sous une forme ou une autre. Alors pourquoi diable en sommes-nous si souvent éloignés ? Nous partons de loin.

Dès le plus jeune âge, nous apprenons à travailler seul, à jouer et gagner contre l’autre, à critiquer plus qu’à encourager. Apprend-on à l’école à rendre service, à être aimable, à partager les difficultés d’apprentissage de son voisin ? Où sont passés nos prix de camaraderie et de bonne humeur ? On célèbre la toute-puissance de l’oeil du maître*, on apprend que « chacun son métier et les vaches seront bien gardées »**.

Pas étonnant que nos systèmes d’évaluation en entreprise restent arc-boutés sur l’individualisation.

Nous sommes notés sur notre travail personnel pendant 20 ans alors que notre vie professionnelle nous demande de travailler en groupe.

On nous parle de cadres supérieurs, mais supérieurs à quoi, à qui ?

Et les médias ne nous montrent pas l’exemple en nous abreuvant de conflits, conscients que la polémique fait vendre.

Le déficit d’esprit d’équipe est profond. Que faut-il faire ?

  1. Créer un environnement de bienveillance. Cela vient doucement : l’éducation évolue et plusieurs pédagogies favorisent le travail en groupe et l’entraide, les jeux collaboratifs se développent, l’optimisme et la pensée positive se propagent, l’économie sociale et solidaire progresse…
  2. Développer nos compétences relationnelles. C’est-à-dire commencer par lâcher prise puis se rapprocher des autres, s’y intéresser sincèrement, s’encourager dans la difficulté, donner confiance et donner envie de cheminer ensemble.
  3. Travailler de façon beaucoup plus horizontale et collaborative. Le travail en groupe demande du temps, de la discipline et de la modestie. Mais à terme, quelles économies d’énergie, d’argent et de malentendus ! Supprimons cet indécent challenge de l’homme du match dans les sports collectifs et soyons généreux de notre temps, de nos idées et de notre implication pour des projets partagés. Voltaire nous y incitait il y a déjà 3 siècles : « C’est n’être bon à rien que de n’être bon qu’à soi ! »

* Fable de 1668 de Jean de la Fontaine

** Conclusion de la fable de 1792 de Jean-Baptiste Claris de Florian Le vacher et le garde-chasse

Philippe Détrie, fondateur de la Maison du Management.

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