Quels ont été les grands principes qui ont guidé vos décisions pendant cette période particulière nourrie d’incertitude ?

À la différence de beaucoup d’entreprises, notre activité n’a pas été impactée par la crise, elle s’est même renforcée et notre priorité a donc été de protéger nos salariés du virus, de jongler avec les directives fluctuantes de l’État, de planifier en flux tendu les interventions des équipes.
L’imprévisibilité est inscrite dans l’ADN de notre entreprise depuis 20 ans. Nous avons donc développé avec mon frère et notre équipe d’encadrants énormément d’agilité et de rapidité.

Ce qui est certain, c’est que plus que de l’incertitude, l’angoisse et la pression sont des états que l’être humain ne peut pas vivre sur le long terme. Cela engendre de la lassitude et un manque de plaisir, pourtant indispensable à l’esprit d’entreprendre.

Dans l’entreprise, l’incertitude est omniprésente. Comment la gérez-vous ? Edgar Morin, philosophe, a écrit « si l’ignorance de l’incertitude conduit à l’erreur, la certitude de l’incertitude conduit à la stratégie ». Qu’en pensez-vous ?

Je pense que plus tu fais face à l’incertitude, plus tu développes ta capacité d’adaptation, comme une forme de résilience face à l’imprévu. Au départ tu suis ton instinct puis avec l’expérience tu inities des process qui te permettent d’enclencher rapidement des plans B puis C…

En fait, tu développes par nécessité de l’organisation, tu mets en place des indicateurs, tu professionnalises tes tableaux de bord, tu apprends aussi à déléguer certaines taches pour te recentrer sur ce qui est de ta responsabilité : la prise de décision. En période de crise, il est essentiel d’apporter des réponses claires et rapides.

Nous avons aussi accepté de prendre du temps pour nous, une forme de maturité nécessaire pour nous préserver et ainsi renforcer la pérennité de l’entreprise.

Vous êtes aussi Président du MEDEF 56, pensez-vous que les dirigeants ont fait évoluer leurs priorités ? Quelles sont-elles aujourd’hui ?

Sans parler de priorité, ils ont compris l’intérêt de s’entourer, de partager, de ne pas s’isoler. Un dirigeant qui ne va pas bien, ne le dit pas, souvent par fierté. Nous on est 2, mais quand tu es seul, tu partages difficilement avec ta femme ou avec tes enfants les difficultés que tu traverses. La Bretagne est un territoire de réseaux, ce qui facilite la communication, l’entraide, l’unité. Les dirigeants que je rencontre sont aujourd’hui confiants, même face à l’incertitude. Ils affichent un positivisme fort, ce qui, à mon sens, va contribuer à relancer rapidement notre économie.

Un autre point marquant que j’ai pu constater, c’est la priorité donnée à l’équilibre de vie. Je crois que beaucoup de dirigeants souhaitent travailler « différemment », en tout cas ils y réfléchissent fortement. Le temps de travail des dirigeants peut être bénéfique jusqu’à un certain point. À l’excès, il peut nuire à la productivité de l’entreprise. L’activité sportive, le sommeil, les loisirs reprennent une place importante dans la vie d’un dirigeant, et c’est une très bonne chose !

ALBAN RAGANI, DIRIGEANT DU GROUPE SÉCURITEAM ET PRÉSIDENT DU MEDEF 56

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